Mais voilà, c'était sans compter sur les difficultés économiques actuelles. Profond dilemme pour les responsables de l'entreprise: des signaux d'alarme sont tirés mais il n'y a pas de budget pour remettre en état les machines cet été. Deux solutions sont envisagées:
1) laisser les installations telles quelles et croiser les doigts pour qu'elles tiennent encore un an ou qu'elles tombent en panne au moment opportun,
2) ou réparer le strict minimum à partir des conclusions du diagnostic vibratoire.
Un réel partenariat est alors nécessaire entre le prestataire et son client. Pas question de se dérober, la maintenance conditionnelle n'est pas un outil automatique avec des robots qui affichent des signaux verts, jaunes ou rouges en fonction de l'état de la machine. Une multitude de paramètres doivent être analysés et décortiqués avec soin pour donner au client les bonnes pistes dans ses choix décisionnels. Les paramètres dépendent de la manière dont sont mesurées les vibrations.
Voici une liste des différents procédés de mesure du signal vibratoire:
- le niveau global (c'est ce qui est le plus facile à interpréter: ça vibre un peu, pas beaucoup, pas du tout). Dans le cas de machines tournantes classiques (moteurs, pompes, ventilateurs,...) tournant à bonne vitesse, cette valeur peut être utilisée en première approche, notamment en se référant à la norme ISO 10816-3. Mais dans de nombreux cas (vitesses lentes, mouvements alternatifs, hautes fréquences,...) cette mesure est largement insuffisante et doit être associée à d'autres paramètres.
- les niveaux fréquentiels: les vibrations se propagent sous forme d'ondes composées de plusieurs fréquences (et non d'une seule et même sinusoïde). Une fois que l'on sait retrouver les origines de chacune de ces ondes, on peut alors les comparer, regarder leur évolution. Ce sont des courbes en 3 dimensions (cascades) que l'on visualise et qui permettent de renseigner très précisément sur les défauts mécaniques et leur évolution.
- les ondes de chocs: il s'agit ici d'une méthode brevetée (aussi appelée SPM) pour observer les bruits de roulements. Là aussi il faut analyser le niveau global (en dB) et les résultats en fréquence (Nota: une multiplication par 100 du signal vibratoire donne une augmentation de 40 dB). Des valeurs limites et des seuils sont donnés ici ou là, mais aucune norme internationale n'existe. Seule l'expérience permet d'en tirer des conclusions exploitables en fonction de l'endroit où est faite la mesure, du type de capteur utilisé et de son mode de fixation sur la machine.
- les bruits d'engrenages, les bruits de roulements à basse fréquence, les impulsions, les mouvements transitoires, etc... sont étudiés avec une artillerie de procédés mathématiques plus ou moins compliqués: spectres d'enveloppe, analyses temporelles, cepstres, démodulation d'amplitude,... Autant de paramètres qu'il faut ajouter pour obtenir un diagnostic fiable.
Une fois tout ça passé à la moulinette et retranscrit de manière synthétique au client, il n'y a plus qu'à faire les bons choix. En l'occurrence il a été décidé de remettre en état au cours du mois d'Août une série de paliers cruciaux et d'attendre le mois de Décembre pour une seconde série. En l'absence de signaux, c'est à l'aveugle que ces décisions auraient été prises.